« Mais pourquoi tu regardes en l’air ? La réponse n’est pas au plafond ! »

     Je ne compte pas les fois où j’ai entendu cette phrase et je ne suis pas le seul, n’est-ce pas ? Je connais même une amie dont l’ancienne maîtresse d’école primaire punissait les élèves qui regardaient au plafond quand ils réfléchissaient.

     « L’ignorance est la mère de tous les maux » comme l’a si bien dit Rabelais. Pour cause, aujourd’hui nous savons que non seulement la réponse se trouve au plafond, ou vers la fenêtre, mais aussi qu’en cherchant la réponse autre part que dans les yeux de nos interlocuteurs nous sommes intellectuellement, ou cognitivement, plus performants. Explorons cela plus en détail…

Le fonctionnement de la mémoire

Avant toute chose, je vous propose de regarder cette très courte vidéo sur la mémoire. Elle résume bien l’ensemble des notions de base à connaître sur le fonctionnement de notre mémoire.

Pour résumer, la mémoire à long terme est composée de plusieurs mémoires. La mémoire épisodique où se trouvent nos souvenirs et la mémoire sémantique où se trouvent nos connaissances du monde. La mémoire procédurale qui stocke tous nos savoirs-faire gestuels (sport, musique, etc.) et la mémoire inconsciente. Il existe aussi une autre mémoire dite mémoire lexicale qui n’a pas été évoquée dans la vidéo. Celle-ci stocke nos connaissances de la « carrosserie » des mots, c’est-à-dire leur forme visuelle et auditive. Maintenant que vous êtes au fait des éléments de base sur la mémoire, je vous propose d’aller plus loin. Savez-vous ce qu’est la Programmation Neurolinguistique (PNL) ?

La Programmation NeuroLinguistique

La PNL est une discipline révolutionnaire souvent mal comprise, critiquée et parfois mal enseignée. Cette discipline est née de la collaboration entre le Linguiste John Grinder et le mathématicien psychologue Richard Bandler. Pour mieux comprendre le fonctionnement des êtres humains, ils ont étudié les stratégies cognitives et comportementales de personnes ayant du succès. Ils ont commencé par observer les meilleurs thérapeutes de l’époque, à savoir Virgina Satir (Thérapie Familiale et Systémique), Frietz Perl (Gestalt thérapie) et Milton Erickson (Hypnose Ericksonienne).

Pour ce faire, John Grinder et Richard Bandler ont étudiés ces personnes via l’observation de nombreuses vidéos d’enregistrement de ces thérapeutes en séance. Ainsi, ils ont effectué des découvertes passionnantes sur le langage. Ceci leurs a permis d’élaborer différents concepts comme celui qui nous intéresse aujourd’hui.

Mémoire et programmation Neurolinguistique (PNL)

Expérience de mémoire #1

Comme rien ne vaut l’expérience, faisons tout de suite un petit jeu. Je vais vous demander de vous filmer afin que vous fassiez les découvertes par vous même et sur vous-même. Allumez et enclenchez l’enregistrement de votre web cam ou de votre smart phone en vérifiant que l’objectif cible bien votre visage.

A présent, écoutez l’enregistrement suivant :

Clés d’accès visuelles et processus cognitifs

Qu’avez-vous constaté ? Vos yeux ont-ils bougé ? Si ce n’est pas le cas, ce qui peut arriver de temps à autre, il y a fort à parier que vous étiez dans une sorte d’observation de vous-même. Cela a pu empêcher le processus de se dérouler naturellement. Dans ce cas, relâchez-vous, respirez amplement à deux ou trois reprises. Ensuite, retentez l’expérience en vous rappelant que vous ne risquez rien en jouant le jeu librement. En général, nos yeux bougent pendant que nous réfléchissons et leurs mouvements dépendent des processus cognitifs que nous effectuons. Je sais ! Cela paraît fou… D’autant plus que l’on ne nous a jamais évoqué ce phénomène à l’école !

En PNL, on appelle ce modèle les clés d’accès visuelles. Quand nos yeux :

  • S’orientent vers le haut ou au centre, nous traitons des images.
  • Restent au niveau des oreilles, nous traitons des sons.
  • S’orientent vers le bas, nous traitons des sensations (à droite) ou nous nous parlons à nous-même (à gauche).

Par ailleurs :

  • Quand nous regardons à gauche, nous nous souvenons.
  • Quand nous regardons à droite, nous créons.

Certains gauchers, environ 10%, ont un schéma gauche-droite inversé. Pour le savoir, il vous suffit de leur poser les bonnes questions et d’observer où leurs yeux s’orientent pendant que la personne cherche la réponse !

Schémas des position du regard en fonction de l'activité cognitive

Expérience de mémoire #2

Faisons une autre expérience.     Je vous propose de fixer pendant 1 minute le nez du visage ci-dessous tout en vous rappelant d’un bon souvenir de vos dernières vacances.

Dessin-Visage

A présent, regardez en haut à gauche et remémorez-vous le même souvenir toujours pendant 1 minute.

Que remarquez-vous ? Les images de votre souvenir sont-elles plus faciles d’accès, plus colorées ? Quels autres changements pouvez-vous observer ?

Une astuce pour retrouver plus facilement des informations dans votre cerveau est de permettre à vos yeux de librement vagabonder. A contrario, les laisser fixer sur la feuille handicape notre capacité à accéder aux souvenirs présents dans notre cerveau. En effet, je dis librement car la position de prédilection qu’ils adoptent varie en fonction du souvenir. Vous pouvez regarder plus ou moins à gauche et plus ou moins haut selon les images dont vous vous rappelez.

Fixer votre feuille peut vous faire « déraper »

Cependant, si vous gardez vos yeux rivés sur la feuille, ceux-ci seront orientés vers le bas. L’accès à des sensations ou à une discussion avec vous-même sera favorisé. De plus si vous ne vous remémorez pas très rapidement la réponse, il est fort probable que vous commenciez à ressentir du doute. En conséquence, vous risquez  de vous dire des propos décourageants du style :

« Ah je sais plus! Mince… Ah ça craint je perds du temps, si je continue je vais rater l’examen, etc. »

     Vos yeux feront des allers-retours gauche-droite, et favoriseront un cercle vicieux anxiogène. Ainsi votre mémoire de travail sera encombrée, voir saturée, par un dialogue inutile et des sensations désagréables.

Une astuce pour plus facilement retrouver des informations dans votre cerveau est de permettre à vos yeux de librement vagabonder !

Vagabondage visuel, science et mémoire

femme qui entoure ses yeux avec ses pouces et index

Vagabondage visuel, performances cognitives et mnésiques chez l’enfant

Expérience sur le vagabondage visuel chez l’enfant

Une équipe de chercheurs s’est intéressée au phénomène de « détournement de regard » déclenché par la réflexion. En effet, nous avons tous déjà observé le regard de nos interlocuteurs se détourner du notre quand ils réfléchissent.

Les chercheurs ont pris comme sujet d’expérience des enfants de 5 ans. Ainsi, il semblerait qu’à cet âge, les enfants n’aient pas encore le réflexe de détourner le regard en situation de gêne sociale. D’une part, ils ont demandés aux enfants du groupe « regard fixe » de l’expérience de fixer le regard de leur interlocuteur pendant qu’ils réfléchissaient. D’autres part,  ils ont demandés l’inverse aux sujets du deuxième groupe, le groupe « regard détourné ». Ce groupe avait pour consigne de détourner le regard pendant qu’ils cherchaient des réponses aux questions qui leur étaient posées.

Résultats de l’expérience sur le vagabondage visuel chez l’enfant

Cette étude a permis de démontrer que le fait de détourner le regard permet de meilleures performances cognitives. Par ailleurs,  cet effet varie en fonction de la difficulté des questions posées. En effet, pour des questions faciles ou de difficulté moyenne :

  • Groupe regard fixe : 55 % de bonnes réponses
  • Groupe regard détourné : 77 % de bonnes réponses

Pour des questions difficiles :

  • Groupe regard fixe : 37 % de bonnes réponses
  • Groupe regard détourné : 61 % de bonnes réponses

Cependant, cette augmentation de performances peut être attribuée à d’autres raisons. On peut supposer que les performances sont meilleures quand les enfants détournent leurs yeux pour d’autres raisons. Par exemple, ils ont pu ressentir une diminution de la gêne induite par la fixation du regard de l’autre, et/ou par la peur de se tromper ou de ne pas savoir. En conséquence, l’activité intellectuelle a pu être favorisée. Des chercheurs ont donc créé une autre expérience où la gêne sociale n’interfère pas dans l’expérience. Pour cela, ils ont placé les enfants devant des écrans d’où les questions leur étaient posées.

Là encore, les performances sont meilleures chez les enfants qui détournent le regard. L’étude conclut, qu’en dépit du rôle que joue l’interaction du regard dans un processus de « questions-réponses », la fonction première du détournement de regard est de favoriser la mise en œuvre des processus cognitifs.

petite-fille-blonde-mignonne

Les enfants qui détournent le regard pendant leur réflexion se remémorent plus de bonnes réponses.

    Les études sur les enfants sont intéressantes mais j’entends d’ici la question qui vous trotte dans la tête. « Ces mécanismes de détournement de regard ont-ils le même impact sur la capacité à raisonner et à se souvenir d’un adulte ? » C’est ce que nous allons étudier tout de suite !

Vagabondage visuel, performances cognitives et mnésiques chez l’adulte

femme regardant en hat à droite en position visuelcréatif

Des chercheurs ont effectué des expériences similaires sur des adultes. La consigne pour les adultes du groupe « regard détourné » était de détourner le regard librement, comme bon leur semblaient. Le groupe « regard fixe », lui, devait constamment fixer les yeux de l’expérimentateur. Les conclusions de cette étude sont les suivantes :

  1. La fréquence du détournement de regard est fonction de la difficulté des questions posées. Plus les questions posées sont complexes, plus le regard est fréquemment détourné.
  2. Ce phénomène ne peut pas être uniquement imputé au besoin de réduire la gêne occasionnée par le contact visuel.
  3. Ce mécanisme est fonctionnel : il améliore les performances cognitives.

Détourner notre regard de celui de notre interlocuteur améliore notre capacité à réfléchir et à donner des réponses justes.

Conclusions

La position de notre regard influence nos processus cognitifs. Le fait de le déplacer consciemment à l’endroit où il irait naturellement lorsque nous cherchons un souvenir va faciliter l’accès à ces informations. Plus généralement, le fait de laisser nos yeux se déplacer favorise notre efficacité intellectuelle et l’accès aux connaissances stockées dans notre mémoire. De plus, cela à l’avantage de nous éviter de fixer la feuille. En effet, fixer la feuille facilite l’accès à nos sensations et à notre dialogue interne. Cela ne nous aide pas à nous souvenir et peut s’avérer dangereux en cas de difficultés.

Maintenant que vous connaissez ce Hack, vous n’avez plus qu’à le tester de différentes manières  ! La théorie est inutile si elle n’est pas accompagnée par l’expérimentation et la pratique. Faites des tests pour découvrir quelles positions oculaires vous permettent d’accéder au mieux à vos souvenirs… et sentez-vous libre de partager vos impressions et vos interrogations.

D’ici nos prochains échanges, rappelez-vous que vous êtes pleins de promesses car :

« Chaque jour nous construisons le cerveau que nous aurons demain ! »

Avec confiance et motivation 😉

Roman Buchta

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Roman Buchta

Formateur et coach de métier, j'enseigne les neurosciences de l'apprentissage, la gestion du stress et la préparation mentale dans diverses écoles supérieures. Curieux et passionné, je suis toujours en quête de découvertes scientifiques fiables et de nouveautés dans le domaine de l'apprentissage et de la performance en condition de challenge.

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